L’urgence climatique oblige à repenser la gestion des forêts, notamment en introduisant des essences d’arbres provenant de régions plus chaudes et sèches dans des zones plus froides. Cette pratique, appelée migration assistée, consiste à déplacer des espèces végétales vers des habitats qu’elles n’auraient pas colonisés naturellement, mais pourraient le faire sur une période de temps écologique. Le projet Giono de l’ONF, lancé en 2011, vise notamment à déplacer des graines de chênes et de hêtres du Sud de la France vers la forêt de Verdun, afin de renforcer sa résilience face au stress hydrique.
Malgré ses avantages potentiels, la migration assistée n’est pas sans controverse. Une étude publiée dans la revue scientifique Oikos en décembre 2023 met en garde contre les dommages environnementaux collatéraux qu’elle pourrait entraîner, notamment en favorisant un tapis forestier plus inflammable et moins dense. De plus, le recours à des espèces du Sud dans des forêts du Nord pourrait avoir des effets néfastes sur la biodiversité et lutter contre le réchauffement climatique.
Les critiques se concentrent également sur le modèle de sylviculture monospécifique perpétué par la migration assistée, qui favorise des essences uniques sur de grandes surfaces. Cependant, des projets comme Migforest explorent la possibilité de mélanger plusieurs essences pour accroître la résilience des forêts.
Malgré les incertitudes quant à l’adaptation des essences déplacées au climat actuel et futur, la migration assistée reste une option parmi d’autres pour adapter les forêts aux changements climatiques. Les experts soulignent que c’est un pari sylvicole pris par l’ONF, qui continue à expérimenter et à évaluer les impacts de cette pratique.
En conclusion, la migration assistée suscite des débats au sein de la communauté scientifique. Entre avantages potentiels et risques environnementaux, il est essentiel de peser les pour et les contre de cette approche avant de généraliser son utilisation. L’adaptation des forêts au changement climatique nécessite une réflexion approfondie et une prise de décision éclairée pour assurer la durabilité des écosystèmes forestiers.